Tout système qui doit perdurer doit reposer sur une base solide
Concevoir un système capable de résister aux imprévus et de s’adapter aux évolutions du marché exige une réflexion approfondie, fondée sur des objectifs précis et bien définis dès le départ.
Trop souvent, on se lance dans un projet en imaginant que les ajustements viendront en cours de route, sans mesurer les conséquences.
Pourtant, l’excellence d’une architecture ne se construit pas au hasard : elle repose sur un socle conceptuel solide, des objectifs tangibles et des jalons clairs.
Si l’on considère que tout produit doit être voué à évoluer (que ce soit pour s’adapter à de nouveaux besoins ou pour tirer profit des innovations technologiques), il devient indispensable d’anticiper.
C’est cette anticipation qui garantit la résilience et l’évolutivité d’un système sur le long terme.
Plus un projet est conçu en ayant à l’esprit une cible précise, plus il sera capable d’intégrer de nouvelles fonctionnalités sans risquer de tout casser à chaque modification.
Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille figer chaque détail avant de débuter la construction d'un système.
Il s’agit plutôt de savoir où l’on va, de définir une trajectoire tout en laissant la place à certains ajustements mineurs si nécessaire.
En d’autres termes, il est possible de se montrer flexible, à condition de ne pas perdre de vue le socle fonctionnel et technique ni l’objectif global du produit.
Les changements radicaux et fréquents, s’ils ne sont pas encadrés par un plan de route bien pensé, fragilisent la structure et engendrent des coûts de maintenance élevés.
L’approche par paliers est le seul compromis entre stabilité et évolution
Pour concilier la stabilité du système avec le besoin d’itération, la livraison par paliers s’avère souvent pertinente.
Contrairement à certaines démarches qui consistent à « découvrir » le produit au fur et à mesure, cette méthode de segmentation planifie chaque étape de construction et de mise en service.
Chaque palier correspond à un ensemble de fonctionnalités cohérentes et à un lot de travaux techniques clairement identifiés (tant pis pour les agilistes fous qui me détestent déjà d'ailleurs).
Cette démarche présente plusieurs avantages.
D’abord, elle clarifie la vision globale : on sait quels objectifs on doit atteindre à chaque palier, quelles briques techniques on doit mettre en place, et comment ces briques s’emboîtent dans la future architecture.
Ensuite, elle offre une stabilité aux équipes et aux métiers, car chacun sait dans quelle direction on se dirige.
Si un changement de cap s’impose, on pourra l’ajuster au début d’un nouveau palier, sans remettre en cause l’intégralité du travail accompli.
Enfin, la livraison par paliers permet de célébrer des réussites partielles tout au long du projet.
Au lieu d’attendre la fin de la construction pour vérifier si le système répond aux besoins, on peut évaluer progressivement les fonctionnalités livrées.
Cette dynamique entretient la motivation des équipes, qui constatent rapidement l’impact de leur travail, et rassure les parties prenantes, qui perçoivent des avancées concrètes à intervalles réguliers.
L’éternel débat : agilité vs. planification par jalons
Depuis plusieurs années, l’approche agile (telle que SCRUM ou d’autres frameworks similaires) est souvent mise en avant pour optimiser la production de logiciels et mieux répondre aux imprévus.
Dans l’idéal, l’agilité propose de livrer fréquemment, de recueillir le feedback des utilisateurs et d’ajuster la feuille de route en conséquence.
Cette promesse séduit, car elle semble épouser l’évolution rapide des marchés.
Pourtant, elle comporte son lot de pièges lorsque l’objectif final n’est pas clairement défini ou si l’on ne tient pas compte de l’infrastructure sous-jacente.
Une démarche agile, lorsqu’elle repose sur une découverte « en marchant », peut mener à un empilement de fonctionnalités dont la cohérence globale reste fragile.
Certains projets finissent par accumuler des couches de code mal intégrées, rendant les maintenances ou évolutions ultérieures coûteuses et risquées.
La fameuse dette technique peut alors s’accroître, faute d’une architecture initiale suffisamment rigoureuse.
Toutefois, il est important de souligner que l’agilité peut parfaitement s’accorder avec la planification par paliers, à condition d’accepter certaines concessions économiques et organisationnelles.
On peut en effet concevoir un produit de manière itérative, tout en se réservant la possibilité (et le budget) de reconstruire le socle technique quand un pivot stratégique se dessine.
La question est donc de savoir si l’on est prêt, dans la pratique, à financer et à supporter de tels ajustements.
C’est d’ailleurs souvent là que le bât blesse : rares sont les équipes qui acceptent de revoir en profondeur la base du projet après plusieurs sprints, alors même que cela s’avérerait nécessaire pour garantir la stabilité à long terme.
Les pressions internes (budget, délais) et externes (concurrence, attentes des utilisateurs) poussent à livrer rapidement, ce qui peut se retourner contre le projet si les fondations ne sont pas pensées pour durer.
Les limites d’une agilité « pure » sans anticipation
Dans bien des cas, l’agilité est mise en pratique sous forme de courts cycles de développement, avec des démos régulières et une adaptation immédiate aux retours du terrain.
Cette approche semble séduisante, car elle réduit le risque de dérive : on ne part pas sur une solution qui s’écarte des besoins, on ajuste en permanence.
Mais à l’usage, si le socle n’a pas été défini pour supporter de possibles transformations, on s’expose à :
Dans une méthode agile purement incrémentale, l’idée de « jeter » un module pour le reconstruire à chaque changement n’est presque jamais envisagée, car cela demande un investissement important.
Pourtant, sans cette possibilité, le système finit souvent par accumuler des compromis architecturaux qui deviennent problématiques.
En pratique, l’agilité réellement appliquée à la lettre implique d’accepter cette remise à plat occasionnelle, mais de nombreuses équipes n’y sont pas préparées.
La solution, c’est de bien circonscrire le périmètre de chaque itération, tout en conservant une vision d’ensemble au niveau de l’architecture.
Ainsi, on évite de multiplier les fonctionnalités incohérentes et on se laisse la possibilité de reconstruire un bloc s’il s’avère inadapté.
Vers un (difficile) équilibre entre robustesse et flexibilité
Pour aboutir à un système robuste et évolutif, tout est question d’équilibre.
D’un côté, on a l’approche par jalons, qui consiste à dresser une feuille de route et à progresser étape par étape, sans remettre en cause l’architecture principale à chaque instant.
De l’autre, on a l’agilité, où l’on valorise la livraison fréquente de nouvelles fonctionnalités et l’intégration continue des retours utilisateurs.
Lorsqu’on cherche à combiner ces deux approches, on mise sur une planification suffisamment claire pour anticiper les évolutions possibles, tout en acceptant que certains ajustements se feront au fil de l’eau.
L’objectif est de ne pas figer trop tôt tous les détails, mais de conserver un cap ferme.
Ainsi, on peut décomposer le projet en paliers stables, rassurer les équipes et les métiers, tout en demeurant suffisamment souple pour intégrer des changements quand cela s’avère pertinent.
Ce fonctionnement exige toutefois une discipline particulière :
C’est de la solidité du socle que dépend la performance d’un produit.
Que l’on opte pour des méthodes purement agiles ou pour une livraison par paliers, l’essentiel est de ne jamais perdre de vue l’importance d’une architecture pérenne.
Un système mal conçu, même s’il répond rapidement à une demande ponctuelle, risque de s’écrouler sous le poids des ajustements successifs.
Inversement, un socle réfléchi, capable de supporter des évolutions, peut accompagner une entreprise pendant des années, sans la contraindre à tout refaire au moindre revirement stratégique.
Yann-Eric DEVARS Consultant et formateur en architecture d'entreprise
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